En 2016, Philippe Bihouix et Karine Mauvilly publiaient « Le désastre de l’école numérique — Plaidoyer pour une école sans écrans ». Ce livre se voulait un cri d’alerte à la suite de l’annonce du Plan numérique pour l’éducation lancé deux ans auparavant par le président François Hollande. Les auteurs voulaient ouvrir le débat, comprendre, contextualiser, prévenir, interroger et mobiliser enseignants, syndicats, élus, parents et citoyens sur une évolution plus que contestable, celle d’une généralisation de l’enseignement sur écran. Les innovations n’ont cessé de fasciner les pédagogues et les plus anciens lecteurs de cette chroniques se rappelleront de la lanterne magique, du cinéma, de l’épidiascope, de la radio, de la télévision, des vidéos, des tableaux intelligents, etc. Bref, à chaque innovation une occasion de s’emballer pour les formidables opportunités qui s’ouvraient.
Il est vrai que le digital à l’école est souvent réduit à un transfert de ce qui existe sur l’écran. Or, la réalité est bien plus complexe et c’est l’essence même de l’approche et du scenario pédagogique qui doit être questionnée par les nouveaux moyens à disposition.

La définition d’une approche et d’un scenario pédagogique trouve son fondement à travers les objectifs pédagogiques retenus (que faut-il apprendre) et l’organisation souhaitée de l’enseignement. Cette approche et ce scenario pédagogique tiennent compte des caractéristiques du public dont les profils varient et de la diversité des contextes. En ce sens et en fonction des contingences locales, l’environnement peut proposer une alternance entre pédagogie synchrone (en présentiel ou à distance) et asynchrone (formation par soi-même) et offrir différents dispositifs numériques. Il s’agit ainsi de proposer un contenu riche et varié dépassant les contraintes habituellement liées à un enseignement « standard ». De plus, l’apprentissage peut être personnalisé en fonction des publics-cibles de sorte à pouvoir créer des parcours pédagogiques (découpage des formations) en adéquation avec les objectifs de chaque apprenant.e, son niveau, sa disponibilité, les facilités dont il dispose, etc. Autant de facteurs à prendre en compte pour plus d’efficacité et de performance en matière de formation. Les dispositifs pour créer cet environnement sont par exemple les suivants :
- Création d’une plateforme de e-learning : Cette plateforme – charnière centrale de l’environnement pédagogique – utilise les technologies multimédias de l’Internet pour améliorer la qualité de l’apprentissage en facilitant d’une part l’accès à des ressources et à des services, d’autre part les échanges et la collaboration à distance. Innovant, ce dispositif permet aux apprenant.e.s d’acquérir les connaissances/compétences visées, de s’entraîner à des situations et de profiter d’un parcours personnalisé adapté à leur avancée dans la formation.
- Usage de la vidéo et présentations animées : Le recours à la vidéo est incontournable. La vidéo – facile d’accès sur différents supports et très percutante – peut proposer un contenu de qualité permettant de capter l’intérêt de l’apprenant et de développer ses connaissances/compétences.
- Classes virtuelles : La formation virtuelle peut remplacer ou être combinée à l’enseignement présentiel, grâce au développement technologique. Des classes virtuelles offrent de nombreuses opportunités d’apprentissage, sous réserve d’être bien conçues et animées.
- Réalité virtuelle et augmentée : La réalité virtuelle et la réalité augmentée peuvent assurer une immersion totale dans le contenu de la formation, ce qui se révèle plus percutant et accélère le processus d’apprentissage.
- Réseau social dédié : L’utilisation d’un réseau social dédié à la formation en question est incontournable. Il s’agit par cet outil de permettre des interactions, l’animation de discussions, la possibilité de commenter des échanges et répondre aux questions des apprenant.e.s.
De manière générale, le modèle d’apprentissage à privilégier doit s’articuler autour d’une répartition proportionnelle des modalités par lesquelles les sujets apprennent efficacement. Idéalement, il s’agirait de partager le temps de formation entre formation « standard » (env. 10%), situations d’interactions sociales (env. 20%) et résolution de tâches complexes (env. 70%), le tout en présentiel ou en virtuel.
L’école numérique doit donc être comprise comme une nouvelle occasion de modifier un environnement pédagogique pour rendre l’apprentissage plus efficient et non un transfert « à tout prix » sur des écrans de méthodes d’enseignement parfois obsolètes. Le bon pédagogue de demain sera donc certainement celui qui maîtrisera cet environnement se situant au carrefour de son art et de celui d’apprentissages toujours plus performants.
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